magazine / interview

Beach House: “Mon fantasme, c’était de passer plusieurs mois en studio”

A l'occasion de la sortie de Depression Cherry, rencontre avec Alex Scally et Victoria Legrand, pour parler du cinquième album (toujours aussi mélancolique), de Baltimore, et de Michael Jackson (un peu).
02/09/2015 / Nico Prat

Après cinq albums et plus de dix années sur la route, on se sent différent ? Par rapport à ses débuts...


Victoria: “Je pense que tu changes en permanence, mais par petits morceaux. Notre façon de communiquer, elle, ne change pas. Nos titres naissent de jam, entre nous, de tests en live, et ça a toujours été le cas. Mais humainement, nous ne sommes plus les mêmes personnes, c’est vrai”.

Vous repartez sur la route pour défendre Depression Cherry. La tournée s’annonce longue. Il faudra donc encore attendre trois ans avant un nouvel album ?


Victoria: “On sait, en finissant une tournée, qu’on n’aura rien de nouveau avant un certain temps. On ne compose pas vraiment sur la route, mais nous avons des idées. Souvent, des intros de titres naissent juste après les tournées, car tu es fatigué de jouer en permanence les mêmes trucs. Un prof m’a dit, un jour, que tu sais quand tu as terminé une oeuvre, une chanson ou un livre, quand c’est juste. Ni bon, ni mauvais, juste”.


Alex: “Au sein d’un groupe, ou même d’un duo, certaines personnes peuvent ne pas être d’accord sur la signification de tel ou tel morceau. Mais ce n’est jamais le cas entre Victoria et moi. On sait donc également quand une chanson est trop longue ou non”.


Victoria: “Nous sommes presque toujours d’accord sur tout, même si parfois, l’un des deux peut avoir des doutes sur une chanson. Dans ce cas, on la joue, plusieurs jours, plusieurs semaines, voir plusieurs mois. On joue, on enregistre, on y revient”.


Kevin Parker, avant même la sortie du dernier album de Tame Impala, affirmait en avoir marre et vouloir passer au suivant.


Victoria: “Ce n’est pas que nous n’aimons pas notre album, mais je peux comprendre Kevin Parker. Au moment où l’album sort, c’est nouveau pour toi, mais nous connaissons ces chansons depuis plusieurs semaines, voir plusieurs mois. On peut donc ne pas ressentir la même passion que les gens”.


Vous vous souvenez de votre premier crush musical ?


Victoria: “Hum, je pense que c’était Piotr Tchaïkovski, ou alors Michael Jackson, je ne sais pas trop. J’étais vraiment petite, je devais avoir six ou sept ans. On m’a dit que ma toute première chanson, celle que j’ai aimé, c’était les Buggles, “Video Killed The Radio Star”. Mais je devais avoir trois ans, je ne m’en souviens pas vraiment. Je dirais donc “Thriller””.


Alex: “Il y avait toujours de la musique à la maison quand j’étais petit, et beaucoup de Motown. Mais je demandais en permanence "Benny & The Jets", les gamins adorent cette chanson”.


Victoria: “Mais quand tu as treize ans et que ta sexualité se développe, tu passes à Bob Marley, puis Weezer… Des trucs aussi que tes parents ne connaissent pas, pour te créer ton propre univers”.

 


Parlons de Baltimore.


Alex: “Avant le premier album, on a toujours reçu beaucoup d’amour de la part de notre ville de Baltimore. Avant de quitter la ville, on a joué pendant un an et demi, environ neuf concerts, dans des clubs, des restaurants, principalement devant des potes. Et en février 2006, une date, notre date, devant 80 personnes environ, mais que nous ne connaissions pas. Ils avaient entendu parler de nous, c’est tout. C’était super excitant !


Former un groupe, c’était un rêve de gamin ?


Alex: “Mon fantasme, c’était de passer beaucoup de temps en studio. Je sais que les gamins rêvent de concerts et de tournées, mais moi je ne pouvais m’empêcher de penser que passer six ou sept mois en studio à travailler sur un album devait être la chose la plus cool du monde. Autant te dire que les groupies ne faisaient pas partie de mes ambitions quand je me suis lancé dans cette aventure”.


Et la scène ?


Alex: “Pour moi, sur scène, le but est de rentrer en transe, et de communiquer cette passion au public. Je ne veux pas sonner trop crétin, mais je pense comparer cela à une expérience sexuelle, c’est un peu la même sensation. En tout cas, c’est ce que j’essaye d’atteindre”


C’est la fin de cette interview.


Victoria: “En interview, je ne parle jamais de ma vie personnelle, tout simplement parce que cela n’a rien à voir avec la musique. Mon petit déjeuner, ma vie sexuelle… Non. Si j’étais un chanteur de rock’n’roll, je le ferais peut-être. Mais non, pas en interview. Dans mes textes, si. En interview, tu as la responsabilité de communiquer quelque chose, de défendre ta musique”


Alex: “Je n’ai pas d’ego, donc je préfère en interview parler d’autre chose que de nous”.

 

En concert au Pitchfork Festival (Paris) le 29 octobre

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