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Jungle: “Ne pas se soucier du label qui frappe à la porte”

Il a beau être en tournée depuis des mois, Tom McFarland, de Jungle, prend le temps de discuter autour d’une bière, quelques heures avant leur concert au festival Primavera, qui sera l’un des beaux moments de cette édition.
03/06/2015 / Nico Prat

Vous êtes en tournée depuis… Toujours, finalement.


Tom McFarland: (Rires) “C’est vrai. Et je ne vais pas te mentir, parfois, tu préfèrerais être à la maison. C’est comme n’importe quel boulot, tu as des bons jours et des mauvais jours. Mais le plus important, dans ces mauvais jours, c’est de ne jamais oublier d’où tu viens et ce que tu es en train d’accomplir. Il serait très facile de penser que nous sommes arrivés, qu’il n’y a plus rien à faire et qu’on peut se la couler douce, profiter du succès. Tu dois garder en tête que tu es chanceux. Alors oui, parfois, tu es malade, parfois, tu voudrais être au lit avec un joint. Parfois tu es malade, tu as la grippe: tu n’imagines pas combien de fois je suis monté sur scène malade comme un chien. Mais tu ne peux pas poser de RTT quand tu as 2000 personnes qui t’attendent de l’autre côté du rideau. Alors à chaque fois, tu y vas, tu montes sur scène, et crois moi, le lendemain, tu te sens mieux, car tu es au bout du monde, dans une ville que tu ne connais pas, et c’est terriblement excitant. Nous sommes humains, tu sais. Parfois, les gens ne répondent pas beaucoup à ce que tu leur offres, et dans ce cas, tu perds un peu de l’excitation, tu peux même te sentir ridicule. Mais c’est très rare. C’est arrivé à Paris, à Londres. C’est souvent Londres, Paris et New-York. Mais quand tu vas à São Paulo, c’est une ambiance de dingue à chaque fois”.


Vu de l’extérieur, on ne vous connaissait pas le lundi et vous étiez des stars le vendredi.


“Quand on y pense, on est sur le point d’être tête d’affiche d’un festival en Angleterre, un an après la sortie de l’album. Oui, c’est rapide. C’est incroyable, on n’espérait rien de tout cela, c’est fou. On y pense, et c’est cool. Flippant, mais cool. J’aime savoir exactement ce que je fais de mes journées, avoir un agenda, un but, gérer les choses. Savoir quand je peux voir ma copine et combien de temps. Mais je ne peux plus faire ça, maintenant que je suis dans ce groupe. Et je pense que cette vie n’est pas faite pour tout le monde, comme notre bassiste OJ, qui a quitté le groupe après la sortie de l’album. Il voulait simplement faire autre chose”.


Dire non à une vie de rock star.


“C’est un rêve que j’avais, être rock star, d’une certaine façon. Ma musique a toujours été la chose la plus importante dans ma vie. Même avant ce groupe, quand j’étais jeune, j’étais danseur, comme ma mère. Donc la musique fait partie de moi depuis très longtemps maintenant. Ecrire de la musique, en écouter, comprendre gamin le sens de certaines chansons… Je savais que d’une façon ou d’une autre, je ferais de la musique. Peut-être dans un groupe, peut-être comme compositeur de musique de film… Ou music supervisor. On a fini par écrire un album, que les gens aiment”.


Vos chansons ont une vraie force: elles parlent à absolument tout le monde. C’est de la très bonne pop.


“On voulait des chansons universelles, mais avec deux niveaux de lecture. Quand tu lis nos textes, tu penses que ça parle de quelque chose, mais en y regardant de plus près, les choses sont plus complexes. Tu attires les gens avec une certaine immédiateté, mais tu dois leur laisser la chance d’explorer un univers plus riche, plus complexe”.


Et avec les journalistes, ça se passe comment ?


“Hum, ça dépend. Certains arrivent avec quinze questions un peu faciles, comme la signification du nom du groupe ou pourquoi on n’apparaît pas dans nos clips, ce genre de trucs. Pourquoi on a de la danse dans nos vidéos ? Parce que c’est cool, tout simplement, cela me semble évident. Mais parfois, tu as une conversation avec la personne, et ça, c’est chouette. Tu apprends à répondre aux interviews finalement. Au début, on ne faisait pas vraiment attention, et nous avons eu une expérience avec le New Musical Express. Une longue interview, on a vu le journaliste cinq ou six fois, pour un article de trois pages au moment de la sortie de l’album. Et nous avons trop parlé, du passé, de nos précédents groupes, du genre de trucs que le NME adore. Le mec était vraiment bon, il a saisi cette opportunité de tout écrire noir sur blanc. Et ça nous a posé souci. Mais il a très bien fait son boulot, clairement. Il a eu ce qu’il voulait”.

 


Et après la tournée ?


“On a des idées pour un deuxième album. Le premier a été écrit sur douze mois, on ne va pas changer ça pour la suite. On est un peu comme Air, Ratatat, ces groupes qui composent sur plusieurs mois. Ils se posent en studio et ne se soucient pas du label qui frappe à la porte pour demander où en est l’album. On vit avec ces chansons depuis plus d’un an, et il est temps de passer à autre chose”.


L’album, justement, vous l’aimez toujours ?


“Oui, car il est dans le commerce. Si on l’aime, on le sort, et on est heureux. Les gens peuvent détester, tant que ton coeur et ta tête sont satisfaits, tu apprends à accepter plus facilement l’opinion des autres”.

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