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STAL & Neil Krug: “Il fallait quelque chose d'épique à l'image de la musique”

A l’occasion de la sortie prochaine du premier album de STAL, discussion croisée avec le musicien et le créateur de la pochette de Young Hearts.
18/09/2015 / Nico Prat

Comment donner un semblant d’âme aux machines, si froides, si tristes ? Pierre Marie, alias STAL, s’est sans doute posé la question avant de se lancer dans la création de Young Hearts, son premier album (désormais disponible en précommande). Le Niçois aime Sigur Ros, M83, et cela, la biographie qui accompagne l’objet le mentionne bien, allant même jusqu’à assumer jusqu’au bout un doux amour pour Coldplay, avec lesquels STAL partage une certaine grandiloquence. On rassurera les grincheux, point d’insupportable tube FM à laisser entre les mains d’un Avicii ici. “Le travail d’un cœur pur qui a banni la noirceur de son existence”, nous dit encore une fois la bio. Pas mieux, et absolument vrai.


L’oeuvre de STAL est sonore, mais également visuelle. Ses clips ne vont pas sans cette pochette qui ne va pas sans musique. Neil Krug a travaillé avec Foals, Tame Impala ou encore Lana Del Rey. Il signe l’artwork de Young Hearts. Pierre Marie t lui nous racontent.

 


Quand avez-vous pour la première fois entendu STAL ?


Neil Krug: “Mon agent m’avait envoyé quelques titres, et j’ai tout de suite adoré. Pierre Marie et moi-même avons eu un rendez-vous à Los Angeles, durant plusieurs heures, et il était clair que nos idées et nos références étaient les mêmes. Certaines rencontres se passent mieux que d’autres”.


Pierre Marie: “Lorsque la question de l'artwork s'est posée, nous cherchions quelque chose d'assez futuriste, qui mélangerait les paysages, pour rappeler le côté assez contemplatif de STAL et d'un autre côté, il fallait des éléments qui devaient evoquer le côté machine et synthétique de STAL. En explorant le web, nous sommes tombés sur son site avec plein de pochettes incroyables pour Scissor Sisters, Ladytron ou encore Juan Atkins qui correspondaient parfaitement à l'univers qu'on cherchait, on l'a donc contacté via son agent”.


Devez-vous aimer la musique d’un artiste pour travailler avec lui ?


Neil Krug: “Je préfère avoir une sorte de connexion avec la musique sinon l’artwork est sans intérêt, anecdotique. Les meilleurs projets sont ceux où l’inspiration est immédiate, et sur laquelle tu peux en quelque sorte surfer”.

 

Comment la musique influence-t-elle votre travail ? Vous pouvez imaginer un artwork juste en fonction de la musique, sans rencontrer l’artiste ?

 

Neil Krug: “Je laisse la musique me dire ce qu’elle veut, dans une sorte de méditation. Je laisse le son influencer le paysage, ou les couleurs de l’oeuvre dans sa globalité, et je complète cette image dans mon esprit avant de m’asseoir à mon bureau et de la créer. Si je n’ai pas le sentiment que cela fonctionne, je vais commencer à gribouiller sur un papier, ou divaguer sur mon ordinateur jusqu’à ce que cela prenne la forme de quelque chose sur laquelle je souhaite travailler plus en profondeur. Rien n’est jamais planifié.  It just hits you in the face when it's ready.


Pierre Marie: “J'ai essayé de lui apporter le plus de termes clés pour comprendre mon univers, dans le style surréaliste mais pas absurde, généreux et coloré et non minimal. Il fallait quelque chose d'épique à l'image de la musique. Et j'ai compris très vite qu'il avait tout saisi à la perfection, le genre de rencontre fluide qui aboutit forcement à quelque chose d'excitant. A partir de là tout est allé très vite (malgré le fait qu'il ait commencé à travailler avec Lana Del Rey à la même période)”.


 

Parlons de cette pochette pour l’album de STAL. Quelle était l’idée ?


Neil Krug: “Avec Pierre Marie, nous avons discuté de l’idée d’un paysage artificiel impossible, donc il était clair que ce ne serait pas une de mes photographies mais plutôt un matte painting 3D. Mon boulot est toujours fun car il n’y a aucune règle. Tout est possible”.

 

Il y a de la nostalgie, en tout cas une certaine mélancolie, qui se dégage de votre travail, non ?


Neil Krug: “Je vois ce que tu veux dire. J’ai le sentiment d’être en général une personne plutôt positive, mais ce n’est pas pour autant que mon travail sera joyeux. Je pense que cette mélancolie vient de l’influence du Nouvel Hollywood, de ce cinéma”.

 

Votre premier souvenir marquant de pochette ?


Neil Krug: “Je crois avoir vu la pochette de In The Court Of The Crimson King de King Crimson quand j’avais cinq ans. Que dire ? Tout vient de là j’imagine”.

 

 

Avec le CD et le mp3, avez-vous le sentiment que la pochette est un art qui se perd ?


Neil Krug: “Peu importe le format, les gens auront toujours envie d’une belle pochette pour accompagner la bonne musique. Les deux fonctionnent ensemble, et c’est aux consommateurs de faire de ce mariage un mariage heureux”.


Pierre Marie: “C'est plutôt le format album qui se perd et donc l'impact des pochettes. Toute l'économie de la musique qui était entièrement basée sur ce format a été chamboulée, mais d'un point de vue artistique, on voit bien qu'on n'a jamais eu autant besoin de visuels ! Il faut sans cesse créer et décliner de nouveaux contenus pour les réseaux sociaux et les différentes plateformes de diffusion de la musique. Donc je dirais que la collaboration entre les musiciens et les graphistes n'a jamais été aussi importante qu'en ce moment, même si elle ne se réduit plus à une pochette principale”.

 


STAL “Young Hearts”

Sortie le 23/10/15

 

Photos © Julien Mignot

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neil krug stal pochette young hearts
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